Entretien avec Myriam Snasni, CPE au collège Louise Michel à Clichy-sous-Bois

Myriam Snasni, CPE au sein du collège Louise Michel à Clichy-sous-Bois témoigne du rôle de Fatiha Charef, médiatrice à l'école au sein de son établissement depuis 3 ans, et de l'impact de son action auprès des élèves.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Myriam Snasni et je suis CPE depuis 5 ans. Mon engagement dans cette voie professionnelle est récent car j’étais initialement diplômée en droit et me destinais à la carrière de magistrat. La découverte de ce qui allait devenir ma vocation s’est faite de manière fortuite alors que j’occupais un poste d’AED temporairement dans la banlieue lyonnaise. Je me suis dès lors engagée dans une reconversion professionnelle. J’ai donc intégré le master MEEF CPE à Lyon et obtenu mon concours après ces deux années de master. Après un passage par l’Académie de Dijon, je suis en poste en Seine-saint-Denis depuis 4 ans.

Comment se décline le projet médiateur à l’école sur votre établissement scolaire ?

Nous bénéficions du projet médiateur à l’école depuis maintenant 3 ans. Il se caractérise d’abord par un travail important de Fatiha Charef, notre médiatrice, autour de la gestion des micro-violences et des difficultés de climat scolaire. Par ailleurs, notre médiatrice œuvre à la formation de nos élèves à la communication non violente et à la médiation par les pairs. Elle est également partie prenante de nombreux projets de sensibilisation et de prévention sur des thématiques très diverses. Le projet "Médiateur à l'école" dans notre établissement présente donc plusieurs axes  permettant à la fois un travail de fond, sur le long terme, en faveur de l'amélioration du climat scolaire mais aussi un travail du quotidien de prise en charge des difficultés rencontrées par nos élèves.

Comment se formalise la coopération avec la médiatrice à l’école au sein du collège ?

Le travail partenarial avec notre médiatrice se manifeste dans tous les aspects de ma vie de CPE. Notre collaboration est étroite et la médiatrice est une personne ressource ou relai pour toutes les situations relevant de ses missions ou compétences. Elle est un collaborateur privilégié au même titre que les autres personnels d’éducation. Aussi, la communication autour des situations d’élèves est permanente, qu’elle soit formelle ou non et la collaboration est constante dans la gestion des situations pouvant relever des champs de la médiation ou de l’éducation à la communication non violente.

Quel est l’impact de la présence d’une médiatrice à l’école dans votre établissement scolaire ?

J’ai eu la chance d’arriver dans l’établissement un an avant le recrutement de notre médiatrice. J’étais personnellement à ce moment là, en train de faire mon propre diagnostic du terrain qui était nouvellement le mien. J’ai été particulièrement frappée par le degré de violence qu’il existait dans les interactions entre élèves. Le niveau de violence intériorisée et banalisée me paraissait très élevé. Les statistiques venaient par ailleurs confirmer ce constat .

L’arrivée de Fathia Charef s’est donc faite au bon moment puisque sur la base de ce diagnostic, nous avons pu œuvrer, par de multiples actions, à réinstaurer de la bienveillance dans les rapports entre élèves et a fortiori à apaiser le climat scolaire.

Les projets engagés par notre médiatrice mais aussi son action quotidienne auprès de nos élèves ont largement contribué à une amélioration significative de notre climat scolaire. Il y a 5 ans, le conflit se réglait nécessairement par la violence physique et verbale. Grâce au travail engagé, les réflexes de nos élèves ont changé face aux conflits. Désormais, les adultes (et la médiatrice en particulier) sont pour eux des référents lorsqu’ils ont besoin d’aide face à une difficulté, un conflit qu’ils ne se sentent pas d’affronter seuls. La figure du médiateur a contribué à rendre une dimension bienveillante à la figure de l’adulte aux yeux de nos élèves.

Comment envisagez-vous la poursuite de la coopération avec la médiatrice à l’école dans les mois et années à venir ? 

Pour moi, les médiateurs à l’école de part leurs missions mais aussi les spécificités de la formation qui leur est dispensée, sont des éducateurs très proches des CPE. Nous avons en commun tout un champ de missions. La polyvalence attendue d’un CPE et la diversité de ses missions font qu’un CPE est souvent débordé et amené à faire des choix, prioriser les tâches. Or, le besoin pour nos élèves de développer des dynamiques relationnelles saines est à lui seul un travail à plein temps.  La présence du médiateur permet de travailler en équipe sur ces questions et d’engager un travail de fond sur des thématiques que le CPE, seul, ne pourrait que survoler.

Enfin, la figure du CPE souffre souvent de préjugés « celui qui punit , rappelle à l’ordre » . Ce préjugé à la dent dure et peut constituer un frein pour certains élèves qui auraient besoin d’aide mais n’osent pas se tourner vers une figure d’autorité incarnant à leur yeux surtout la discipline.

La présence d’un médiateur garantit la présence d’un adulte dans l’établissement pas ou peu concerné par les enjeux disciplinaires. Il est rassurant de savoir qu’il existe une figure proche du CPE mais moins « intimidante » vers laquelle les élèves peuvent se tourner en cas de difficulté.

De la même façon, sur un territoire où les familles sont éloignées de l’École, la médiatrice est une personne qui semble plus accessible pour certains parents. Elle contribue ainsi à une véritable amélioration dans le rapport des parents de nos élèves avec l’École. La médiatrice se fait souvent le relai de difficultés rencontrées par les élèves mais pour lesquelles les parents n’osent pas toujours contacter la CPE ou un personnel de direction directement.